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Vous avez bien dit de la margarine, docteur ?

par Dr Carol Vachon, consultant en nutrition  
Le cholestérol fait peur... surtout de ce côté-ci de l'Atlantique. Pour les Européens, cela frise la phobie. Car le cholestérol est une des molécules les plus essentielles de l'organisme, entre autres, comme élément de base des membranes cellulaires. De la sorte, il participe aux régulations de la cellule.

Saviez-vous quand un végétarien a le plus de cholestérol dans le sang ? Après le repas, suite à l'absorption du cholestérol provenant des sels biliaires nécessaires à la digestion de son repas. Le cholestérol fait intimement partie de la vie.

MARGARINE ET CHOLESTÉROL
On la conseille parce que tartinable comme le beurre, mais exempte de cholestérol. Un choix éclairé ? Voyez par vous-même.

LES HUILES VÉGÉTALES RAFFINÉES
La margarine est produite à partir de ces huiles, soit ce que vous achetez à l’épicerie. Première étape, l'huile est extraite de la graine par pression en utilisant un solvant organique à température de 85-90°C, puis chauffée de nouveau à 80-150°C pour extraire le solvant. Ce solvant, généralement l'hexane, est un type de solvant à peinture. Suivent la démucilagination à 70-90°C avec l'acide phosphorique, la neutralisation à 60-75°C avec de la soude caustique diluée, puis la décoloration à l'argile activée à 80-110°C. La désodorisation termine le tout sous vide à 240-270°C. Les conditions et procédés varient avec l'huile et le fabricant.

Ainsi traitées, les huiles sont à peu près dénudées de couleur, d'odeur et de saveur, conséquences de la perte des phospholipides (dont la lécithine), minéraux et oligoéléments (fer, cuivre, cobalt, manganèse, etc.) et des caroténoïdes (1). Il y a donc perte de la plus grande partie des petites molécules de l'huile, ce qui inclut les antioxydants que l'on sait si utiles à la santé. Par contre, sont récupérés intacts presque tous les corps gras de l'huile, dont les gras essentiels.

LE RAFFINAGE DES ALIMENTS EST NOCIF, comme celui des fibres, protéines, sucre, etc. Le raffinage des huiles est d'autant plus nocif qu'il est hautement chimique. La perte de nombreuses substances modifie fort probablement la digestion de ces huiles, d'après les recherches : une telle huile ne sera pas assimilée comme le seraient les huiles pressées à froid de la tradition. J'élabore dans un ouvrage sur le sujet (2).

LA MARGARINISATION
Cette dernière étape s'effectuait par hydrogénation partielle à une chaleur de 130-200°C à l'aide de catalyseurs chimiques. Il est hautement cocasse, pour être poli, qu'on n'ait découvert que sur le tard ce qui suit : les gras générés par l'hydrogénation, les gras «trans», se sont avérés les gras les plus dangereux pour les artères... qu'on voulait protéger par la margarine car exempte de cholestérol. Vision peu intuitive de la santé.

Il y a les margarines non hydrogénées, obtenues par le procédé de la trans-estérification (rien à voir avec les gras «trans») dont les conséquences sont hautement suspectes, mais peu investiguées. Selon moi, ces margarines sont «moins pires», pour le dire québécois. Morale : chaque fois qu'on emprunte la voie chimique en alimentation, nous accentuons nos troubles au lieu de les réduire.

Il y a plus de 15 ans, une étudiante à la maîtrise en nutrition avait cherché à savoir s’il y avait un lien entre l'alimentation et les troubles des seins lors des règles. Ô surprise, il n'y avait qu'un seul lien statistique, soit avec les gras polyinsaturés. On s'attendrait au contraire. J'ai expliqué que ça devait être lié au raffinage. Malheureusement, les huiles pressées à froid ne sont pas considérées par le milieu scientifique. L'à-peu-près alimentaire que fournit l'industrie comporte tant d'aliments suspects qu'on peut deviner tout le potentiel guérisseur d'une alimentation naturelle.


Références scientifiques
  1. FAO/OMS. 1977. Le rôle des graisses et des huiles alimentaires en nutrition humaine: rapport d'une consultation mixte d'experts à Rome.
  2. Les huiles pressées à froid, une mise à jour scientifique favorable. Carol Vachon, à compte d'auteur, juin 1991, 44 pp.
Article paru dans l’Infolettre Saveurs Nature vol 1 no 3
14 mars 2012
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